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Marie Hardouin de Gallese, épouse d’Annunzio


Marie, fille de Don Guilo de Gallese et de Natalia Lezzani de Castel Sant'Elia, est née à Rome en 1864 et décédée à Gardone Riviera en 1954. Elle épouse en 1883 Gabriele d’Annunzio. Le couple a eu 3 fils : Don Mario, Don Gabriel et Don Veniero. Ils se séparent, sans toutefois pouvoir légalement divorcer en 1890.


C’est vers cette époque qu’elle se rapproche d’Antonio de La Gandara si l’on en croit Philippe Jullian dans Robert de Montesquiou - Un Prince 1900 "Toutes les nouvelles arrivent au solitaire. Ainsi il s'amuse des aventures du toujours beau La Gandara : Colette Willy en est folle, puis c'est l'épouse délaissée de d'Annunzio qui se jette à son cou".


Le poète, de son côté envisage en 1905, d’épouser La Duse (cf. Les Amants de Venise de Claudine Brécourt-Villars, 1994) et demande en vain la nationalité Suisse pour pouvoir obtenir le divorce. Marie ne s'y opposa pas. Elle écrit au frère du peintre, Edouard "Si le rêve charmant que ns faisons avec Antonio se réalise je n’oublierai jamais que vs y avez contribué par le zèle et l’intelligence de vos démarches à faciliter l’avenir. Vs aurez toujours la première place à notre foyer et dans notre affection…"


Le Tout Paris les croise au Pavillon des Muses chez Robert de Montesquiou en juin 1904 ou à la conférence que donne le comte sur la gravure japonaise en novembre. A la fête de Neuilly, organisée par Montesquiou en 1906 ils sont présents pour écouter les grandes tirades théâtrales et les concertistes conviés pour l’occasion. Alors que l’artiste a invité chez lui ses amis pour présenter ses dernières œuvres, l’Echo de Paris relate le 2 juillet  1906: "Sur un long divan Empire, M. Chéramy discute avec Mme Gabriele d’Annunzio des mérites de la robe rose au taffetas changeant ; la princesse Alexandre de Chimay et le comte Matthieu de Noailles, très rapprochés du cadre, admirent les cassures de l’étoffe, ses lumières, ses demi-teintes dorées…". De là peut-être date le choix de la robe que portera la dame de cœur du peintre en 1907. C’est l’année où le peintre réalise un des nombreux portraits de l’image blonde et rose de la duchesse de Gallese qui sera exposé et très remarqué au Salon de la Société Nationale du 15 avril au 30 juin au Grand-Palais.


Pastel de Marie d'Annunzio dans une pose proche du tableau finalL'artiste et son modèle devant une étude en coursLe portrait de Marie d'Annunzio

L’artiste dans son atelier en compagnie de son modèle pour une séance de pose (à gauche pastel préparatoire, à droite œuvre finale)


L'allure du modèle est gracieuse et la robe est peinte avec une grande habilité en rose pâle, dans une attitude d'un rythme heureux, d'une habilité d'exécution extraordinaire, avec une perception très vive des préciosités et des morbidesses modernes. C’est d’une incontestable distinction du trait et de la tonalité, où rien n’est laissé au hasard telles les nuances fugitives qui naissent et meurent aux plis de moire. Elle est assise sur un tabouret et son profil se dessine à gauche, tandis que sa robe est comme balayée par une rafale. Le portrait est reproduit dans toutes les revues et magazine de l’époque : Femina avec la couverture pleine page le 15 avril pour l’ouverture du salon. Femina à nouveau du 15 oct 1904 avec une belle critique de Louis Vauxcelles. Les Arts n°65. Art et Décoration de mai 1907 avec un article élogieux de Camille Mauclair. Lectures pour Tous de mai 1907 avec plusieurs photos dont une de l’artiste avec son modèle et en légende: 'Mon œuvre préférée, la voilà : celle à laquelle je travaille'. Le Mois Littéraire et Pittoresque de juin 1907. Le Bulletin des musées de France de juillet 1937. Paris, mon cœur… - Ed. Pierre Tisné de Chéronnet et Ferrand, 1945. L'Art Vivant–De 1900 à nos jours – Ed. Pierre Cailler de Florent Fels, 1950.


L’Album Mariani s’épanche ainsi sur l’œuvre : "Les créations d’Antonio de la Gandara, suggestives, élégantes et un peu mièvres se détachent du cadre où le peintre les enferma, comme des roses fanées, des figures songeuses et délicates ou d’extraordinaires, d’insolites floraisons de velours, de nacre et d’or vieilli. Imbu de la tradition castillane et de la pure filiation espagnole, l’artiste a su retrouver, dans l’apparat des costumes modernes, toute la suprême, fastueuse et colorée splendeur des types de Vélasquez et de Zurbaran, et, c’est bien dans la vivace et mondaine peinture de ses portraits que se perpétue, augmentée encore d’un cachet de gravité et de distinction, la royale beauté des Infantes et des Princesses. Le portrait de Mme Gabriele d’Annunzio reste dans cette tradition hautaine et délicate; l’ondulation des lignes, la mollesse et l’éclat des chairs, celle plus éteinte et plus douce des étoffes s’y résument en finesse et en distinction; la gamme des tons y chante et toutes choses y sont, par la coloration, belles et expressives, d’une palette où jouent tous les tons de pierre, des ors mats et roses… il y a aussi de l’allongement de la grâce anglaise, de la vaporeuse et svelte élégance des ladies de Reynolds et de Gainsborough".


La Revue Illustrée  d’avril 1907 : "Qu'une femme doit être heureuse quand il se trouve un peintre qui sache en même temps si bien rendre sa beauté et si bien peindre sa robe!.. Quelle est cette dame blonde dans cette robe rose? — C'est Mme Gabrielle d'Annunzio, la femme du romancier et auteur dramatique célèbre."


L’Art Décoratif -  n° 106   de 1907 donne l’occasion à Achille Segard d’écrire : "Le plus somptueux des tableaux est celui de Mme d’Annunzio, prestigieuse harmonie de roses. L’art de M. La Gandara est d’une suprême élégance. Son habilité est prodigieuse. Il excelle à traduire avec des lignes et des couleurs ce qu’il y a de plus affiné chez les Parisiennes de ce temps".


Marie d'Annunzio et Antonia, la fille de l'artistePlusieurs pastels et toiles ont également immortalisées le modèle dont ces deux versions de Cache-cache au jardin du Luxembourg. L’un d’entre eux est remarqué par Janie Villiers-Wardell dans Spain of the Spanish en 1915 (Ed. Ch. Scribner's Sons, New York) : "One of the most fascinating portraits of a woman I have ever seen is this artist's pastel sketch of Madame Gabriele d'Annunzio: I prefer it to his large and important portrait in oils of the same lady". (Un des plus fascinants portraits féminins que j’ai pu admirer est le pastel qu’il réalisa de Mme Gabriele d’Annunzio. Je le préfère même au grand portrait qu’il réalisa d’elle)


Arrive 1909, les projet de divorce et de mariage qui ne se concrétisent pas. L’amitié reste très présente mais La Gandara se remarie le 15 avril avec Charlotte Saint-André. La décision est une souffrance pour Dona Maria mais l’amitié sincère survit au tournant affectif. Leurs rencontres s’espacent mais ils continuent à s’écrire ainsi en 1911 "Cher Ami, je voudrais vs envoyer un peu de ce beau Ciel ! Je vs envoie mon souvenir et celui de maman, en vs disant dans un mois. Ma santé assez bonne, ma vie monotone, mes enfants de grands enfants…hélas ! Marie"


Le 30 juin 1917, l’artiste meurt subitement. Marie est à Rome et apprend la nouvelle par la presse, elle écrit immédiatement à Edouard, le frère de l’artiste le 4 juillet : "Cher Edouard, Hier sur le Messaggero italien, mes yeux sont tombés par hasard sur cette ligne. Je vous écris immédiatement le coeur serré, espérant encore que cette triste nouvelle ne soit pas vraie. Je vous prie de m’envoyer un mot pour me rassurer - mais si vraiment pauvre Antonio était mort croyez à la part très grande que je prends à votre douleur, à celle de Manuel, de pauvre Raymonde et de ma petite amie Antonia. Je voudrais savoir quelle a été la maladie et qq détails. Veuillez m’en donner, mais j’espère et je souhaite que ces lignes imprimées soient menteuses. Je ne peux croire à une nouvelle si horrible. Je vous serre la main très affectueusement cher Edouard. Marie d’A.”


De gauche à droite, le duc de Gallese, sa petite fille, Xavier Mathieu, la fille du duc et la duchesse d'AltempsL’amitié envers Edouard et les relations épistolaires se poursuivent au delà de cette date, ainsi le 1er sept. 1939 " Cher Edouard, et moi mon ami très cher, je vous embrasse. Faisons des vœux pr nos deux belles patries. Je suis à Vichy pr la 2ème fois cette année. Je compte rentrer très bientôt. Je vous remercie pr l'aimable invitation. Gardez-la moi pour le retour. Si ma fidèle et jeune amie Antonia est à Paris un bon baiser de ma part. A bientôt. Marie d'A." Et peu de temps avant la disparition d’Edouard le 6 sept. 1943 "Mon cher ami, Merci très en retard pour vos affectueux souhaits. Je m'étais absentée pour tâcher de reposer mes pauvres nerfs. Je quitte Paris ce soir pour Gardone riviera, Prov. de Brescia, d'où je vous enverrai mes nouvelles. J'espère pouvoir rentrer en France bientôt si possible. Je pense souvent à vous, mon ami très cher. Courage et bon espoir.  Je vous embrasse de toute mon affection. Marie"


Marie, en difficultés financières, doit mettre en gage son portrait auprès d’un homme de loi à Milan. Elle ne le récupérera pas. Ce portrait resta dans la descendance du lawyer qui mit en vente son bien en juin 2013. C’est la descendance de la duchesse de Gallese qui racheta le tableau qui préside la salle de réception de leur résidence romaine. Sur la photo ci-contre la famille réunie en compagnie du biographe de l’artiste Xavier Mathieu.


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